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Protégeons nos enfants des images sublimes abdominales

Jusqu’où se loge la violence des scènes susceptibles de heurter la sensibilité de jeunes spectateurs ? A côté de la découverte des chercheurs du centre d’imagerie cérébrale de l’Université du Kansas, le cinéma rose cochon et le navet à l’hémoglobine, c’est du pudding aux fraises. Ils ont soumis vingt enfants de dix à dix-sept ans à divers types d’images, juste avant ou après leur repas. Parmi elles figuraient d’insoutenables photos d’aliments. En parallèle, ils ont scruté l’effet de ces images directement dans le cerveau de la jeunesse. Et qu’ont-ils vu ? L’appel de la bonne chère. Sa seule vue provoque une activation des régions limbique et para limbique du cerveau. Chez les enfants obèses se produit une hyper stimulation avant et après repas. Celle-ci perdure plus longtemps chez eux une fois la belle chère consommée. Deux interprétations possibles. Soit l’obésité infantile serait liée à un dérèglement du cerveau, trop excité à la vue de la moindre religieuse. Soit c’est votre télé qui aurait besoin d’un petit réglage pour dégraisser l’écran pub d’un peu de friture.

Dominique Martin

Juillet 2010 

La virilité se joue à la pointe de la fourchette

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L’homme, sous-entendu le mâle, est un exhibitionniste qui s’ignore. Une expérience de laboratoire vient de le prouver. Dans la nature, rien n’est plus visible et ostensible que le combat titanesque des baleines mâles, la joute bois contre bois des cerfs dans les forêts ou les concours de roucoulements des pigeons ramiers à la parade. Tout cet étalage de force et de performances pour s’assurer de leur supériorité vis-à-vis des autres mâles et impressionner les femelles nous fait sourire, nous hommes tout entiers pétris de culture par-dessus le socle bestial. Pourtant les comportements d’exhibition et les démonstrations de virilité face à nos rivaux, tout ce tapage et tambourinage de poitrine est on ne peut plus commun chez notre espèce. C’est ce que révèle l’expérimentation conduite par quelques chercheurs de la Cornell University située à Ithaca dans l’Etat de New York USA. Une vingtaine d’étudiants ont servi de cobayes. Certains ont été mis au défi de manger le plus d’ailes de poulet possible avec la perspective de recevoir une médaille (en toc). Ils en ont mangé quatre fois plus que d’autres invités juste à en faire leur dîner. Certains ont par ailleurs réalisé l’épreuve en présence de spectateurs. Il s’avère dans ce cas que les hommes en ont avalé encore 30% de plus. En public ou non, tous ont trouvé cela très grisant et cool de participer à une telle compétition. A l’inverse, face aux spectateurs, les femmes ont freiné des deux mandibules. Elles ont mangé 30% d’ailes de poulet en moins par rapport à leur score en huit-clos. Dans les deux cas, elles sont sorties des épreuves avec un sentiment d’embarras et quelque peu complexées. Dans une seconde expérience sur quatre-vingt-treize étudiants, les chercheurs ont voulu voir si les champions des concours de mangeaille, sport très répandu aux USA, sont perçus comme plus «forts» et susceptibles d’engendrer une plus large progéniture. Il en ressort qu’aux yeux de tous, de grandes performances alimentaires ne rendent pas les femmes plus attractives. Mais lorsque ces prouesses sont le fait des hommes, le sexe opposé n’y est pas vraiment sensible. Autrement dit, l’alimentation en société conduit, par le processus de rivalité, à la suralimentation chez les hommes exclusivement, ceci en pure perte.

Dominique Martin

Janvier 2017

« Big Data is watching you »in the closet

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Savez-vous le propre de l’homme? Il n’est pas fiable. Dans l’ère robotique qui s’ouvre devant nous humains, ce défaut de conception devient de plus en plus gênant, voire rédhibitoire. Pas de souci, il sera bientôt corrigé par une connexion haut débit en illimité avec l’intelligence artificielle. Cette nouvelle divinité en charge de notre futur ne sait ni feindre ni mentir, pas encore. Faute de mise à jour, l’homme archaïque reste lui victime de son cerveau et de sa biologie qui n’ont rien de l’électronique d’un ordinateur. La mémoire sélective, l’art de pécher par omission, les petits arrangements avec soi-même, la dissimulation sous le tapis, voilà bien les limites du vieux logiciel humain lorsqu’il s’agit de répondre de ses actes. Ces bugs infectent le quotidien des scientifiques penchés sur nos pratiques alimentaires, tout particulièrement lorsqu’ils tentent de repérer les comportements erratiques de leurs semblables virosés aux malwares du diabète, du surpoids et de l’obésité. Toutes les enquêtes déclaratives censées reconstituer ce que nous ingérons sont entachées de grandes auréoles d’erreurs, de cette distorsion de la réalité dont l’espèce humaine est la spécialiste. Elles se résument à des pis-aller, faute d’échantillonner le trafic digestif à la source ou à son embouchure. C’est la tâche courageuse à laquelle se sont attelés les chercheurs de l’Imperial College London: relever la lunette et porter un regard inquisiteur en direction de cette lune à décrocher. Notre corps est une belle machine qui émet quotidiennement son flux de données. Mais hélas tout est perdu: au lieu d’alimenter les tuyaux de la science et ses lumières, les datas s’écoulent abjectement dans les sombres canalisations du tout à l’égout. Ce que montrent les travaux de la sérieuse et vénérable université britannique est qu’il suffirait de connecter ce flux à un terminal d’analyse pour éclairer enfin la face cachée de nos comportements alimentaires. Un simple test d’urine, voilà qui remplacerait des tonnes de questionnaires rébarbatifs aux réponses peu fiables pour savoir si notre alimentation est équilibrée. Ce test serait une vraie photo du profil diététique de ce que nous mangeons : sucre, gras, protéines, fibres, etc. Matin, midi et soir, trois jours durant, dix-neuf volontaires ont offert leur urine à la science pour que les chercheurs calent leurs équations à partir des centaines de métabolites analysés dans le liquide de couleur or. La fiabilité a ensuite été éprouvée sur une cohorte de patients impliqués dans des études précédentes, près de trois cents sujets des couronnes britanniques et danoises dont on avait conservé des fioles d’urine et enregistré les régimes au quotidien. Si la précision reste à affiner, les chercheurs sont optimistes. Selon eux, le test serait disponible d’ici deux ans. On imagine le développement industriel qui s’en suivra. Hardware pour recueillir les données, sous forme de toilettes intelligentes et connectées. Et pour le software, des alertes postées à jet continu sur votre smartphone. Mais gare au bénéfice que certains pourraient retirer de possibles fuites d’infos urinaires. Des datas brokers pourraient vendre ces flux de données intimes à votre assureur ou aux marchands de régimes du net. On nage en pleine science miction.

Dominique Martin

Février 2017

A quelle vitesse l’on se reproduit : une question de poids

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L’impasse reproductive, serait-ce là le stade ultime de l’évolution de notre espèce? Depuis une dizaine de millénaires,les humains prolifèrent à tout va en s’assurant toujours plus de ressources alimentaires, énergétiques, etc. En ce début de 21ème siècle, la faim finit de céder à l’excès de nourriture son rang de premier fléau affectant l’humanité. Selon une étude américaine, la survie même de notre espèce pourrait en être affectée. A moins qu’il s’agisse d’un nouveau modèle du couperet de la sélection naturelle généré par notre propre développement? Les chercheurs de l’Eunice Kennedy Shriver National Institute of Child Health and Human Development ont étudié en détail la fertilité de cinq cents couples volontaires d’une cohorte suivie pour analyser les liens entre leurs performances reproductives et l’exposition aux produits chimiques de leur environnement. Les couples procréateurs ont été suivis jusqu’à la grossesse ou sinon pendant un an après leur première tentative de conception. Il ressort que le premier facteur affectant leur capacité de procréer est l’obésité. Lorsque celle-ci est sévère (indice de masse corporelle supérieur à 35) pour les deux partenaires du couple, le délai pour concevoir un enfant est allongé de 60% par rapport aux géniteurs n’ayant point de surcharge pondérale. Imaginons exacte l’hypothèse d’une part héréditaire dans l’épidémie d’obésité mondiale. Dans ce cas, notre espèce s’engagerait dans une sélection via l’alimentation, laissant plus de chance de se reproduire à celles et ceux parmi les moins fragiles face à la pléthore alimentaire.En supposant que l’hypothèse soit fausse, l’humanité entière dans sa course folle au surpoids s’apprêterait à marquer le pas dans son expansion. Peut-être est-ce ainsi, en totale inconscience, qu’elle y gagnerait le salut: stabiliser un poids fixe d’humains sur la planète, en d’autres termes maintenir son indice de masse corporelle mondiale à un niveau acceptable, ceci en limitant la démographie par l’arme alimentaire de l’obésité massive ! Réguler le surnombre par le surpoids, l’argument peut paraître fallacieux. En étant moins cynique tout en adoptant la frugalité des antiques Cyniques, on peut aussi continuer de croire en les vertus de la raison, faculté de l’humanité qui lui permettrait de juguler sa taille sans s’exploser le tour de taille.

Dominique Martin

Mars 2017